Quand j'ai vendu ma 8°meule en 88 (la 550 Honda), je venais d'avoir 34 piges, ma première était juste née et on avait besoin de blé pour changer de caisse.
Cette bécane, je l'ai eue 7 ans et j'étais devenu avec elle un motard accompli : beaucoup roulé par tous les temps et un peu partout en France, mais surtout j'avais réussi seul, deux ou trois ans plus tôt, une réfection du haut moteur parce qu'elle fumotait et bouffait un peu d'huile. Changement des guides soupapes, des soupapes, des pistons et des segments. C'était le moulin le plus complexe que j'avais ouvert assez sérieusement, et j'étais fier de m'en être sorti proprement. Au passage j'avais monté un 4 en 1, des longue-portées, un klaxon à compresseur et une bagagerie.Euh je radote, j'en ai déjà causé dans ma présentation.

C'est pour dire que cet objet comptait quand même pas mal pour moi.
Soit dit en passant j'aurais dû la garder bien sûr, pour ce que j'en ai tiré ! J'aurais maintenant un collector assez classe...

Il ne me reste d'elle que trois ou quatre photos papier, que je ne sais pas faire passer sur un écran pour vous montrer à quoi elle ressemblait.
Mais je n'ai pas hésité à la vendre, parce que à cette époque les chevaux m'avaient pris la tête depuis un bon moment. En gros, dix ans.
J'étais en train de préparer le passage du monitorat d'équitation, option dressage, que j'ai obtenu quelques mois plus tard. Non pour en faire mon métier. Simplement par passion. C'était un sésame pour qu'on me confie des chevaux à travailler pendant mes loisirs, ce que j'ai fait jusqu'à acheter le mien.
Un bon cheval à dresser, c'est un mystérieux défi à chaque fois. Ca se réussit dans la durée, et à cause de sa mémoire (excellente) et de son émotivité, il faut toujours peu de choses pour rater son coup si l'animal est qualiteux. Car un bon cheval doit être ardent et réactif. Toujours prêt à bondir. Une montagne de muscles de disons 450 à 700 kilos (selon sa taille bien sûr), doté de réflexes trois fois plus rapides que les nôtres, taillé pour la fuite à 50 ou 60 à l'heure. Savez-vous qu'il ne dort que trois heures sur 24, et le plus souvent debout ? Le reste de son temps, dans la nature il le passe à manger le plus souvent, à se déplacer pour trouver une meilleure nourriture, à sentir (les partenaires sexuels potentiels, mais aussi et surtout les prédateurs), à surveiller les signaux de ses chefs dans la hiérarchie du troupeau, à jouer s'il est jeune, se chamailler ou faire le beau pour asseoir sa place dans la hiérarchie ou conquérir une partenaire...
Mais quand on réussit à gagner sa confiance, à s'installer en patron rassurant, en évitant les luttes dont il sort toujours soit vainqueur soit "cassé" au moins mentalement, quand on sait se fondre dans le mouvement qu'il nous donne, en se servant le moins possible de nos pauvres muscles d'hommes mais plutôt de notre cerveau, de notre souplesse et de notre sensibilité physique, quand ses allures prennent de la cadence, de la lenteur, de la hauteur et du moelleux, je vous raconte pas le pied qu'on prend !
J'ai eu de la chance, je ne me suis cassé que cinq ou six os en 35 ans de pratique régulière. Tant que je ne suis pas trop décati, j'espère avoir encore l'occasion de monter sur leur dos, mais surtout d'essayer de m'accorder à eux (même à pied !), d'en faire des partenaires, silencieux et... quasiment télépathes quand tout va pour le mieux.
Voilà pourquoi ils ont pris la place de la moto dans l'échelle de mes passions.
Après tout les motos ne sont que des machines.
J'aime bien ma XJ. Le peu que j'ai roulé à son guidon, j'ai kiffé. Belle gueule (j'aime pas trop les bécanes modernes, on dirait des robots transformers

), belle musique, bonne pêche, belle allonge sûrement, assez bonne partie cycle on dirait (je la connais pas encore). Freinage, euh on verra...
Mais j'aime les chevaux.