Geronimo. Hugh ! C'est le titre de notre dernière tentative dans les salles obscures. Un film de Tony Gatlif, le chantre de son peuple gitan qu'il met en scène au fil de sa filmo.
Dans son petit dernier, il revisite le mythe de Romeo et Juliette et en fait une sorte de "West side story" à la sauce flamenco-sinistro-banlieusarde, parfois très inspirée, souvent brouillonne mais toujours généreuse. Qu'on en juge : une jeune donzelle turque est enlevée, le jour de son mariage forcé, par son amoureux éperdu, un gitan foufou qui se sauve avec elle au guidon de sa grosse mobylette (un 125 hors d'âge, Honda si j'ai bien vu, qui n'a qu'un petit rôle mais s'en tire avec les honneurs avant de tomber en rideau vu son grand âge : très beau et long plan de la mariée, en robe blanche flottant derrière elle dans le vent créé, en croupe sur le petimono kaki dont le bellâtre énamouré triture joyeusement le sélecteur pour en tirer la quintessence, à grand renfort de taïauts d'allégresse jusqu'à leur planque glauque au bord de l'eau...
). Cet affront à la communauté turque ne peut rester impuni et le frère de la mariée se jure de tuer sa soeur pour venger l'honneur de la famille. C'est compter sans la solidarité tzigane, et du coup l'affrontement entre les deux clans paraît inévitable.
Ici intervient Geronimo (Céline Sallette, habitée par son rôle et qui porte une bonne partie du film sur ses frêles mais jolies épaules), une éduc qui bosse depuis longtemps avec ces deux communautés. Elle va faire le tampon, le médiateur, l'essuie-glace entre les partisans du règlement de compte de l'un et l'autre clan tout le long du film, jusqu'au au péril de sa vie. Elle les connaît tous, elle est acceptée depuis longtemps mais là, elle galère un max, elle se démène, elle navigue à vue et c'est pas gagné qu'elle évite la grave baston.
Un soir, et rien que pour ça le film vaut le détour, elle assiste notamment dans un rade pourave à une presque baston. En manière de défi symbolisé, on a droit à une battle de danse, hip-hop acrobatique magnifique et magnétique sur les musiques d'inspirations tzignane et turque alternativement. Je crois que Gatlif signe ou cosigne les ziques de ses films. La bande-son de cette scène vous mettra des fourmis dans les reins et vous serez scotchés par le spectacle, braves gens. Grand moment.
Ce sidi (belle abbesse), si je ne me suis jamais ennuyé, le film m'a souvent semblé décousu, et sur le plan formel de qualité inégale. Notez bien, vu les décors c'est un peu inévitable: pas facile de dénicher du beau, de faire du bon cinoche non stop au coeur des friches industrielles des banlieues sinistrées dont les murs sont tenus par les ados acteurs amateurs presque toujours bluffants qu'à castés Gatlif ! (Desmo y trouvera sûrement son compte, vu ce que lui inspirent les ruines d'usines usées dans son coin...
) Les moments forts alternent avec les croquis un peu bâclés, mais c'est Gatlif et on l'aime.
Allez donc remplir sa cagnote en prenant un ticket, la cause est juste !